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	 Le jour où l’URSSAF s’est effondrée !
	 
	Albert Moulin se pencha par-dessus l'épaule de sa femme qui, assise à la 
	caisse, examinait les trois lettres que venait de lui remettre le facteur. 
	 
	— Toujours rien de l'URSSAF ? demanda-t-il. 
	— Non, répondit-elle. 
	 
	Il balança énergiquement la tête. 
	 
	— Tu vas voir, lança-t-il, ça va encore nous retomber dessus.  
	— Le courrier n'arrive presque plus. C'est normal, dit-elle. 
	— Oui, mais les pénalités, qui va les payer, c'est nous ! 
	 
	Cela faisait au moins dix jours qu'il aurait dû recevoir ce fameux 
	formulaire de l'URSSAF pour régler ses cotisations sociales. Evidemment, il 
	pouvait toujours faire un chèque et une lettre, mais chinois comme ils sont 
	là-bas, ils étaient bien capables de lui mettre dix pour cent de plus, comme 
	l'an dernier quand paraît-il sa déclaration était arrivée après la date, 
	alors qu'il l'avait mise à la poste largement à temps. 
	 
	— Bon ! eh bien puisque c'est comme ça, je vais y aller, moi, à l'URSSAF. 
	 
	Mme Moulin savait qu'il était inutile de tenter d'en dissuader son mari. 
	Quand il avait pris une décision, il l'exécutait, même s'il était certain au 
	fond de lui-même que c'était idiot. Il allait perdre une demi-journée et 
	s'énerver pour un bout de papier qui était peut-être enseveli sous les 
	décombres d'un bureau de poste ou même n'était jamais parti. Mais Albert 
	était ainsi fait que quand on le cherchait, il s'arrangeait toujours pour 
	qu'on le trouve. 
	 
	Ah ça ! Ce coup des dix pour cent de l'an dernier, il ne l'avait sûrement 
	pas digéré. Lui qui était la régularité même dans ses papiers, on l'avait 
	pénalisé pour une faute qu'il n'avait pas commise. Ce sont des choses qui ne 
	se pardonnent pas. Il n'avait pas fait de recours, parce que ça lui aurait 
	encore fait gâcher du temps et qu'il se disait que forcément il perdrait 
	puisqu'il n'arriverait jamais à prouver que l'administration avait commis 
	une faute, et pas lui, mais il gardait sa colère en lui, et elle ne 
	demandait qu'à exploser. 
	 
	Il prit sa voiture et se dirigea vers le siège de l'URSSAF. Il n'y était 
	jamais allé. C'était en banlieue, et il connaissait l'adresse par coeur pour 
	l'avoir lue des centaines de fois sur les imprimés qu'il 
	recevait et pour l'avoir inscrite tout aussi souvent sur les 
	enveloppes qu'il envoyait à l'organisme. Il éprouvait une sorte d'allégresse 
	à se transporter ainsi en personne vers le lieu d'où partaient vers lui, 
	comme des flèches, des volées de tracas. Enfin il allait avoir en face de 
	lui des gens vivants, qui auraient un corps et un visage, et des oreilles 
	pour l'entendre. Parce qu'il avait des choses à leur dire, oh oui. Leurs 
	papiers à la con, qu'ils les envoient, bon, d'accord, on n'y peut rien, 
	c'est la loi et ce n'est pas eux qui l'ont faite. Mais qu'ils ne les fassent 
	pas partir à temps et que le pauvre commerçant soit ensuite puni par leur 
	faute, ça non, ça ne se passerait pas comme ça. 
	 
	Cela faisait des semaines qu'il n'avait pas quitté son quartier. Il 
	découvrait la capitale comme un touriste. Ce n'était vraiment pas une vie 
	facile qu'il menait. Sa droguerie marchait bien, mais sa femme et lui 
	travaillaient comme des esclaves. Ouverts six jours sur sept et le septième 
	faisant des papiers. A quarante-deux ans il se sentait déjà presque vieux. 
	Non, pas vieux : usé. Usé par la paperasse, par les formalités, par le 
	spectacle de tous ces gens qui ne foutaient rien et ne vivaient pas si mal 
	et qui lui contestaient le droit de gagner trois sous et d'en profiter ou 
	d'en faire profiter ses enfants. Dans le fond, c'était la société qui 
	l'indignait, pas les gens. Les gens, il les voyait tous les jours au magasin 
	et il les aimait bien. Et s'il ne les avait pas aimés, ç'aurait été idiot de 
	sa part de se mettre dans le commerce. Non, l'ennemi, c'était 
	l'administration. Et justement, l'administration, il y allait, et elle 
	pouvait se préparer à l'entendre. 
	 
	Il se perdit deux ou trois fois avant d'arriver dans la rue de 
	l’URSSAF. Comme celle-ci était en sens interdit et qu'il n'avait pas envie 
	de tourner encore en voiture au risque de se perdre à nouveau, il partit à 
	pied. Il n'eut pas besoin d'aller jusqu'au numéro de l'URSSAF pour 
	comprendre. De loin, on voyait les gravats qui encombraient la rue, ne 
	laissant qu'un étroit passage pour les véhicules. Il contempla 
	le spectacle pendant un long moment. Ça lui faisait un drôle d'effet, ce 
	bâtiment par terre. Oh ! il en avait vu d'autres, depuis quelques mois, 
	subir le même sort, mais celui-là c'était un peu son ennemi intime et il 
	avait l'impression d'avoir subi une perte personnelle. 
	 
	— Ça fait combien de temps que ça s'est effondré ? demanda-t-il à un 
	passant. 
	— Combien de temps ? Environ huit jours. Enfin, j'en sais rien,
	moi, je suis pas du quartier.  
	Albert eut envie de lui dire qu'il n'était pas du quartier non plus et 
	que ça ne l'empêchait pas d'être concerné par ce foutu bâtiment, mais enfin, 
	s'il fallait tout expliquer à tout le monde. Il avait fait sien le précepte 
	selon lequel le client a toujours raison, et il l’étendait au passant. 
	 
	Son problème était donc réglé. Enfin : pour le moment. Parce que rien ne 
	disait que tous ces braves gens ne s'étaient pas réinstallés ailleurs, 
	n'attendant que le moment de lui tomber dessus. Mais cela lui semblait une 
	hypothèse peu probable. Tout devait être concentré dans cet énorme bâtiment 
	et d'ici qu'ils se réorganisent, de l'eau coulerait sous les ponts. 
	 
	Le plus étonnant était qu'il n'avait rien su. Un bâtiment comme ça, quand il 
	s'effondre, bon dieu on en parle ! Il est vrai qu'il ne lisait pas trop les 
	journaux et que pour la télévision, il arrivait trop tard chez lui, à cause 
	de la fermeture du magasin. Moralité, il n'était au courant de rien. Enfin, 
	de rien, il ne fallait tout de même pas exagérer. Il 
	parlait avec les gens dans son magasin, et il savait des choses que les 
	journalistes ne savaient peut-être pas. Mais c'était des choses que de toute 
	façon on ne met jamais dans les journaux. 
	 
	C'était bizarre, ces effondrements. Au début, il avait eu peur comme tout le 
	monde que ça se produise n'importe où. Mais maintenant, c'était évident, il 
	n'y avait que l'administration de touchée. Les particuliers étaient tout à 
	fait tranquilles. Lui, son magasin, il n'avait plus peur qu'il s'effondre. 
	Sa certitude ne reposait sur rien de précis, sauf sur la constatation que 
	les bestioles avaient un ennemi et un seul, le même que lui d'ailleurs : 
	l'administration. 
	 
	En revenant, dans la voiture, il pensa aux termites. Fallait être franc, ils 
	n'avaient rien d'attrayant, ces insectes. Mais enfin le boulot 
	qu'ils faisaient dans le pays, il fallait bien qu'un jour quelqu'un le 
	fasse. D'accord, personne de sensé n'aurait fait les choses comme ça. Tout 
	foutre en l'air, c'est pas des méthodes. Mais on devait bien reconnaître que 
	pour se débarrasser une bonne fois de l'administration, c'était peut-être le 
	seul moyen. 
	Débarrassé... Est-ce qu'on en était sûr ? L'administration c'est comme une 
	queue de lézard : ça repousse. Mais compte tenu des dégâts, ce n'était pas 
	seulement une queue neuve qu'il lui faudrait, au lézard, mais aussi des 
	pattes et une tête, autant dire tout un corps. On était tranquille pour un 
	moment. 
	 
	Arrivé au magasin, il ne se priva pas du plaisir de produire son petit 
	effet. 
	 
	— Moulin vainqueur à la première reprise, lança-t-il gaiement à 
	son épouse. 
	— Ah bon ? Tu as réglé ton problème ? 
	— Et comment ! c'est bien simple, ils en ont été renversés. 
	— Tu ne t'es pas battu au moins ? 
	— Avec qui ? Il n'y a plus personne. 
	— Ils sont en grève ? 
	— Mieux que ça. Ils sont à la rue. Il n'y a plus d'URSSAF. 
	— C'est pas possible... mais, comment on va faire ?  
	Tiens, c'était vrai ce que disait sa femme. Comment ils allaient faire ? 
	Tout à sa joie d'être délivré, il n'avait pas réfléchi aux conséquences de 
	la disparition de l'URSSAF. Car l'argent qu'il lui envoyait, ça n'était pas 
	vraiment le sien. Il y en avait une partie qui était retenue sur la paie de 
	ses employés et puis une autre qu'il payait, lui, mais qui, finalement, leur 
	appartenait aussi, puisque c'était pour qu'ils soient assurés. Tout ça 
	n'était pas simple. Il n'avait plus à se tracasser pour les délais et les 
	pénalités, mais le nouveau problème était autrement plus ardu que celui-ci. 
	 
	Ils en discutèrent longtemps le soir, après le dîner. Sa femme soutenait 
	qu'il fallait quand même payer, mais elle ne savait pas à qui. Lui disait 
	que s'ils versaient cet argent à un organisme quelconque, ils ne le 
	reverraient jamais et que le jour où il faudrait vraiment payer ils seraient 
	obligés de le faire à nouveau. 
	 
	Comme ils n'en sortaient pas, ils décidèrent d'aller se coucher. C'était 
	assez de problèmes pour la journée. Ils avaient éteint depuis quelques 
	instants quand Albert demanda à sa femme : 
	 
	— Tu dors? 
	— Non. 
	— Finalement, cet argent, si on le leur donnait ? 
	— A qui ? 
	— Au personnel. 
	— Mais pourquoi ? Il n'est pas à eux. 
	— Justement si... Enfin, disons qu'il n'est pas à eux mais pour 
	eux. 
	— Mais... est-ce qu'on sera en règle ? 
	— Ça, je n'en sais rien. 
	— Écoute, on en parlera demain, dit sa femme qui commençait 
	à s'endormir. 
	 
	Au petit déjeuner, ils parlèrent à nouveau du problème, mais sans parvenir à 
	prendre une décision. 
	 
	— J'ai une idée, dit-elle, tu devrais en parler à M. Luzner. 
	— Tu crois ? 
	— Oui. Il est un grand directeur à la Sécurité sociale, je crois. C'est dans 
	la même branche, il doit être au courant. 
	— Tu as raison.  
	Il décida de guetter le passage de M. Luzner devant le magasin. Il 
	faisait partie de leurs clients. En général il leur achetait un peu de 
	matériel de bricolage, la veille des week-ends. Il devait avoir une maison 
	de campagne où il s'amusait à planter quelques clous de temps à autre. Mais 
	comme il habitait le quartier, ils l'apercevaient très souvent. 
	De fait, Moulin n'eut pas à le guetter longtemps. Le matin même, il passa 
	devant le magasin. Albert sortit en hâte et alla vers lui. 
	 
	— Monsieur Luzner, je pourrais vous demander un conseil ? 
	— Ah ! Monsieur Moulin ! Volontiers.  
	Albert remarqua que son interlocuteur n'était pas rasé. Il avait un 
	journal sous le bras et pas de cravate. Il ne devait pas travailler ce 
	jour-là. 
	 
	— Voilà, Monsieur Luzner, j'ai un problème avec l’URSSAF.  
	Il lui expliqua les faits, et les diverses solutions que sa femme et lui 
	avaient envisagées. 
	 
	— Vous savez, Monsieur Moulin, il n'y a plus d'URSSAF, plus de Sécurité 
	sociale. Les bâtiments s'effondrent les uns après les autres. Moi-même je 
	n'ai plus de bureau. 
	— Mais alors, qu'est-ce que je dois faire ? 
	— Je n'en sais rien, Monsieur Moulin. Comment voulez-vous que je le sache?
	 
	Albert Moulin resta muet de stupeur. Il s'attendait à tout sauf à ça. 
	Même un grand directeur dans cette branche-là était incapable de lui donner 
	un conseil ! Alors lui, pauvre Moulin, comment pourrait-il s'en sortir ? 
	 
	— Je ne sais pas, finit-il par dire, j'ai eu une idée. Elle est sûrement 
	mauvaise. Mais je vous la dis quand même. J'ai pensé que je pourrais 
	peut-être donner cet argent, je veux dire celui de l'URSSAF, à mon 
	personnel. Parce que, voyez-vous, il ne m'appartient pas. 
	— Oui... C'est une bonne idée. 
	— Ah ! vous trouvez ? 
	— Oui. C'est une bonne idée.  
	Albert le sentait troublé. 
	 
	— Je ne sais pas... ça n'a pas l'air de vous plaire tellement cette idée. 
	— Si... si, Monsieur Moulin. 
	— Vous pensez qu'il y a un risque, c'est ça ? 
	— Un risque... Non. Seulement... ça va être un tournant... Mais peut-être 
	faut-il le prendre. Oui, c'est peut-être vous qui avez trouvé la bonne 
	solution. 
	— Oh, vous savez, moi ce que je veux, c'est ne pas avoir d'ennuis. Et puis 
	je veux être honnête avec mon personnel. C'est des gens avec qui je 
	travaille toute la journée, je ne veux pas les voler. 
	— Je crois... oui, je crois que vous avez raison, dit Luzner, l'air absent. 
	Allez, au revoir Monsieur Moulin.  
	Il s'éloigna, voûté, pensif, son journal sous le bras. Moulin se dit 
	qu'il avait bien changé. 
	Le lendemain, à la fermeture du magasin, il réunit le personnel. C'était un 
	bien grand mot pour les trois employés qu'il avait, deux hommes et une 
	femme, mais il n'y en avait pas d'autre. Il leur dit que l'URSSAF n'existait 
	plus et qu'il avait décidé de leur verser les sommes que, normalement, il 
	envoyait à l'organisme. Ils étaient là, tous les cinq, sa femme, lui et les 
	employés, debout, en blouse marron. Il y avait de la gravité dans l'air. 
	Comme personne ne disait rien, Albert demanda à la cantonade : 
	 
	— Alors, ça vous va ? 
	— Ben... oui, dit Clavel.  
	C'était le plus vieil employé du magasin. Il avait dans les 
	cinquante-cinq. Il s'était exprimé en vertu des devoirs que lui conférait 
	son ancienneté, mais ne semblait pas très convaincu par la solution du 
	patron. 
	 
	— Mais, qu'est-ce qu'on va en faire, de cet argent ? dit Mme Jeanne, une 
	petite brune de quarante ans, très soignée et que les clients aimaient bien 
	parce qu'elle était toujours de bonne humeur. 
	— Ce que vous allez en faire ? Ce que vous voulez, c'est votre argent.  
	Il n'allait pas, lui, Moulin, se mêler de la manière dont ils utilisaient 
	leur paye. Ses responsabilités s'arrêtaient au moment où il la leur versait. 
	 
	— C'est de l'argent pour être assuré, reprit Mme Jeanne. Moi, je crois qu'il 
	faudrait le verser à l'assurance. 
	— Oui, Madame Jeanne, dit Moulin avec un brin d'énervement, mais il n'y a 
	plus d'assurance, vous comprenez. 
	— Oui, bien sûr. 
	 
	Mme Jeanne avait prudemment battu en retraite. Elle n'aimait pas du tout 
	s'opposer à son patron, ni à quiconque d'ailleurs. Ça ne servait à rien, 
	sauf à s'énerver. 
	 
	— Il doit quand même y avoir d'autres assurances, dit Pascal, le dernier 
	venu du groupe, un blondinet d'à peine vingt-cinq ans. 
	— Comment ça, d'autres assurances ? demanda Moulin. 
	— Eh bien... d'autres assurances. Des assurances qui vous assurent comme la 
	Sécu. 
	— Mais non, dit Clavel. Y a la Sécu et puis les assurances. C'est pas la 
	même chose. 
	— Y a des gens qui n'ont pas la Sécu, dit Pascal. Ils sont bien assurés 
	quelque part. 
	— Tout le monde a la Sécu, dit Clavel. 
	— C'est vrai, ce que dit Pascal, reprit le patron, y a des gens qui n'ont 
	pas la Sécu. Ou alors ils ont une Sécu spéciale, une autre Sécu si vous 
	voulez, mais privée. 
	— Une Sécu privée ? 
	 
	Clavel tombait des nues. Moulin précisa son propos : 
	 
	— Oui, enfin une assurance qui remplace la Sécu. Privée. 
	— Il faudrait qu'on se renseigne, dit Pascal. 
	— Moi, ce que je sais, dit Mme Jeanne, c'est que je veux absolument être 
	assurée. A notre époque, on ne peut pas se permettre de rester sans 
	assurance.  
	Ils se séparèrent sur le constat qu'ils avaient tous à réfléchir encore. 
	 
	Deux jours après, les esprits avaient évolué. Chacun avait fait son calcul. 
	Ce que voyaient les employés, c'est qu'ils allaient toucher une somme 
	supérieure de moitié à leur salaire. Evidemment, il faudrait s'assurer avec 
	cet argent supplémentaire, mais ils l'auraient entre les mains. C'est Clavel 
	qui était le moins chaud pour cette solution. Il avait passé l'âge, 
	estimait-il, de faire des expériences. Ce en quoi il ne disait pas tout à 
	fait la vérité, car cet âge-là, il ne l'avait jamais eu. Ses collègues lui 
	firent remarquer que le problème n'était pas de faire une expérience, 
	puisque la situation d'avant n'existait plus, mais de décider s'ils 
	prenaient leur argent eux-mêmes ou s'ils demandaient au patron de le verser 
	pour eux à une assurance. 
	 
	— Moi, je suis pour que le patron s'en charge, dit Clavel. 
	— Moi, j'aimerais mieux vous le verser directement, dit Moulin. C'est pas 
	que je me défile, mais franchement j'ai déjà assez à faire avec le magasin 
	et puis les papiers et puis tout. Alors je me vois pas en plus aller vous 
	chercher une assurance. D'autant que je ne 
	suis pas sûr qu'elle vous conviendra. Vous n'avez pas tous les mêmes 
	problèmes. Je crois que le mieux, c'est que chacun s'assure de son côté. 
	Enfin si vous trouvez une assurance qui vous va à tous, rien ne vous empêche 
	de vous grouper. 
	— Et à ce moment-là, dit Clavel au patron, c'est vous qui verserez l'argent 
	pour nous. 
	— Dans ce cas, d'accord, concéda Moulin. Mais c'est à vous de la trouver et 
	de prendre votre décision.  
	Le débat était clos. L'argent fut versé. Moulin se sentit soulagé. 
	C'était curieux, ce sentiment qu'il avait. Quand il payait à l’URSSAF, ça 
	lui faisait mal. Pourtant il savait bien que cet argent n'était pas à lui. 
	Mais là, versant à chacun une assez belle somme finalement, il se sentait 
	plus riche. Allez donc savoir pourquoi.  
	Claude Reichman 
	« La révolution des termites » ( Albatros,1990). 
	 
	
	 
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