eBay 
	et la richesse des nations 
	 
	De récentes nouvelles parviennent sur l'essor extraordinaire de ce marché 
	aux puces mondial réalisé par « eBay » et fonctionnant 7 jours sur 7. Ce 
	développement et sa rapidité conduisent à réfléchir à la richesse des 
	nations. 
	 
	Voyons d'abord quelques chiffres et données. 
	 
	L'édifice dans sa formidable complexité s'est bâti en 10 ans, avec 
	évidemment le torrent des milliards se déversant sur ses créateurs. C'est 90 
	millions de personnes qui s'y retrouvent régulièrement. Beaucoup d'entre 
	elles résident dans des villes moyennes, c'est-à-dire des villes inférieures 
	à 5000 habitants : c'est donc un décloisonnement pour elles.  
	La valeur des transactions annuelles est de 60 milliards de dollars. La 
	société fait ses bénéfices sur les commissions prélevées à chaque 
	transaction. Son chiffre d'affaires avoisine les 9 milliards de dollars 
	annuels. Les bénéfices sont considérables, sans que nous ayons les chiffres 
	précis sous la main à ce jour. La concurrence est venue avec un certain 
	nombre de sites essayant de copier : en France, Priceminister. Cette arrivée 
	de la concurrence est bon signe et annonce de nouvelles innovations. eBay se 
	lance maintenant dans un service de petites annonces gratuites.
	Venons-en maintenant à la richesse des nations.  
	La chimère de la comptabilité nationale 
	 
	Depuis des décennies s'est développée l'idée folle de mesurer la richesse 
	des nations : c'est la comptabilité nationale qui inflige aux populations la 
	ruine par son existence même. Elle se résume, avec des travaux absolument 
	gigantesques dans chaque pays, à une pyramide de chiffres dont le sommet est 
	le mythique PIB : les gens sont considérés comme plus riches si le PIB 
	augmente, et encore plus s'il augmente dans son rapport à la population. Sur 
	cette base, avec tous les dédales de la pyramide, les politiques organisent 
	leur pouvoir quasi totalitaire et manipulent une foule de compteurs devant 
	prétendument agir sur la chimère du PIB : ils renouvellent ainsi 
	inlassablement leurs promesses de lendemains qui ne chanteront jamais.  
	 
	Ce n'est pas dans la brièveté de cet article le lieu d'énumérer toutes les 
	erreurs des calculs de la comptabilité nationale, telles que beaucoup 
	d'économistes les dénoncent et telles que nous en avons souvent traité. Les 
	thuriféraires de la chimère se rendent bien compte d'ailleurs de la vanité 
	de ces travaux. Estimant dans certains pays que les chiffres sortis par 
	leurs bureaux ne leur conviennent pas malgré toutes les manipulations, ils 
	rêvent d'un autre indice : il existe déjà l'indice du développement humain 
	ou IDH et il s'ajouterait le « Bonheur National Brut ». Si ces nouvelles 
	chimères continuent à grandir, il faudra un ministre du bonheur traquant le 
	bonheur partout alors que d'autres chassent le PIB, lequel se dérobe comme 
	dans un mirage.  
	 
	Pourquoi la mensongère comptabilité nationale ruine-t-elle les populations 
	du monde entier ? Il y a au moins deux réponses.  
	 
	La première est son coût absolument extravagant : immensité des statistiques 
	exigées non seulement des entreprises mais aussi des particuliers, services 
	pléthoriques dans tous les pays, idem au niveau des organisations 
	internationales. Personne de sensé ne pourra jamais calculer ce coût 
	tellement il dépasse l'imagination. Il appauvrit massivement les gens par 
	les impôts ou l'endettement nécessaires. 
	 
	Un deuxième facteur s'ajoute : c'est l'intervention des politiques déjà 
	signalée. Agissant comme d'habitude selon leur bon plaisir ils prennent des 
	décisions arbitraires dans le cadre d'une comptabilité pourrie. Ils 
	saccagent ainsi littéralement la richesse générale. La fable internationale 
	des prétendus plans de relance en est une manifestation récente et 
	désastreuse. Un des dommages collatéraux de la chimère de la comptabilité 
	nationale est, grâce à la propagande et à l'éducation nationale, la 
	confiance que les gens finissent par accorder à la chimère. Ils célèbrent 
	même les politiques qui la manipulent. Ce n'est pas le cas unique dans 
	l'histoire, bien au contraire, où les victimes adorent les responsables de 
	leurs malheurs.  
	La mondialisation heureuse 
	 
	Le succès étonnant de eBay apporte dans ce contexte beaucoup 
	d'enseignements. 
	D'abord, il confirme par un biais nouveau la vanité de tout effort pour 
	mesurer la richesse des nations. Aucune comptabilité nationale ne pouvait 
	recenser des richesses cachées que la firme californienne a fait surgir, et 
	très probablement nous n'en sommes qu'au début. Dans une période définie 
	parfois comme la civilisation de la consommation, elle a d'une façon 
	surprenante animé des objets qui dormaient partout : c'est le réveil des 
	objets. L'inventeur d'eBay en a eu l'idée par hasard. Il mit en vente sur 
	son propre site informatique un pointeur laser cassé et eut la surprise de 
	vendre cet objet tout à fait inutile grâce au caractère mondial d'Internet. 
	Il a tout aussitôt enfourché l'idée et en galopant s'est trouvé milliardaire 
	en sept ans. 
	 
	Le slogan de la firme à présent est « vos placards sont des mines d'or ». En 
	France, selon les calculs : 12 milliards d'euros. La richesse dormait là et 
	personne ne s'en occupait. Si les objets inutiles redeviennent une richesse, 
	un autre phénomène s'observe : l'espace disponible total s'accroit puisque 
	les placards et les greniers sont libérés pour un autre usage. Personne ne 
	peut évidement chiffrer l'influence sur la richesse de ces faits nouveaux. 
	Les économistes, les vrais, savent que la richesse vient du capital et non 
	de la consommation, contrairement à ce que prétend la vulgate de la 
	comptabilité nationale. La tendresse des politiques pour la consommation 
	vient de ce qu'en distribuant de l'argent qu'ils n'ont pas ils acquièrent 
	gloire et clientèle. C'est au contraire la richesse qui permet de consommer. 
	eBay réveille le capital dans la mesure de son intervention.  
	 
	Le nouvel instrument est aussi le fruit de la mondialisation heureuse. 
	Certes il y a des remous dans certains métiers comme celui de brocanteur et 
	éventuellement d'antiquaire, certains professionnels s'y mettant. De 
	nouveaux métiers se créent. Il est plus que probable que des commerçants 
	d'un nouveau genre apparaissent grâce à l'existence d'eBay. Cela provoque la 
	fureur des gouvernements en place qui ne peuvent pas supporter de voir un 
	nouveau métier s'exercer sans qu'ils puissent prélever leur tribut, ce 
	qu'ils essayent de faire dans la plupart des pays. 
	 
	Un autre aspect à souligner est la grande sécurité de ce nouveau marché 
	absolument mondial. Sans réglementation publique, les gens se sont organisés 
	pour faire fonctionner la machine dans une grande sécurité juridique et 
	financière. Et même, d'une façon surprenante, les créateurs ont eu 
	l'intelligence de prévoir un système interne d'évaluation des intervenants : 
	les tricheurs sont discriminés et exclus d'office, alors qu’un code officiel 
	avec des milliers de pages n'arrive jamais à bout des fraudeurs.  
	Le libre marché 
	 
	Le succès d' eBay est aussi et surtout le succès du libre marché, seul moyen 
	d'assurer, sans pour autant la mesurer, la richesse des nations. 
	D'une façon complémentaire, il donne à chacun le droit de gérer son bonheur. 
	L'un le trouve en amassant de copieux comptes en banque, l'autre le cherche 
	en les dispersant pour l'amour de Dieu. 
	 
	Michel de Poncins  
	
	 
	 
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