Il faut casser les grandes banques ! 
	 
	Les nouvelles réglementations sur les banques (Bâle III) ou Mme Lagarde 
	prévoient qu’il faut renforcer la solidité financière des banques 
	européennes et que donc elles vont devoir procéder à des augmentations de 
	capital massives pour éviter une répétition de la crise de 2008. Ces 
	tentatives de « renforcer » les banques en les obligeant à effectuer des 
	augmentations de capital m’amènent à deux remarques.
	La première est qu’il n’est pas du tout prouvé que les banques aient été 
	responsables ou uniquement à l’origine de cette crise, les Etats ayant une 
	énorme part de responsabilité dans ce désastre (voir mon livre « Libéral 
	mais non coupable », chez Francois Bourin éditeur) 
	 
	La deuxième est encore plus ennuyeuse. Cette remarque indique que Mme 
	Lagarde et les autorités de Bâle ne comprennent pas grand-chose à la façon 
	dont fonctionne un système bancaire, ce qui est un peu …inquiétant. C’est ce 
	point que je veux développer aujourd’hui. Je vais le faire de manière un peu 
	caricaturale, mais je pense que ce que je vais dire est juste, quoique 
	volontairement schématique. 
	 
	Le métier d’une banque est de prêter l’argent que ses déposants lui ont 
	confié mais aussi de l’argent qu’elle a elle-même emprunté à l’extérieur (à 
	une autre banque par exemple). Ces dépôts et ces emprunts constituent son 
	passif. A l’actif, elle aura les prêts qui ont été consentis, mais comme 
	tous les prêts ne sont pas remboursés, certains emprunteurs faisant 
	faillite, il faut que la banque ait un capital suffisant pour absorber ces 
	pertes sans que les déposants aient à en souffrir. Bien sûr, il faut que les 
	taux d’intérêts soient suffisamment élevés pour que la banque couvre ses 
	frais de financement, plus une prime qui couvre les risques de faillites « 
	normales ». Au cas où nous entrerions dans une période anormale (récessions, 
	dépressions), il faut en plus que la dite banque ait un capital 
	suffisant pour absorber ces pertes anormales  
	 
	Imaginons que les autorités de contrôle, pour couvrir ce dernier risque, 
	décident que les banques soient dans l’obligation de conserver à tout moment 
	un capital égal à 10 % des prêts consentis. Cela veut donc dire que cette 
	banque peut « porter » à 900 euros son volume de prêts (approximativement) 
	et avoir une taille de bilan de 1000 euros (900 de prêts+100 de capital 
	grosso modo). Comme de nos jours la plus grosse partie de la masse 
	monétaire (M2 par exemple) a comme contrepartie des prêts bancaires, on peut 
	donc avancer sans craindre de se tromper beaucoup qu’il existe une relation 
	forcement assez stable entre la masse monétaire dans un pays et le capital 
	du système bancaire. Si le capital des banques est équivalent à 100 euros, 
	on voit bien que la masse monétaire doit être à peu prés de 1000 euros… 
	 
	Imaginons encore que les génies qui nous gouvernent décident que les banques 
	doivent avoir soudain un capital non plus équivalent à 10 % de leurs prêts, 
	mais à 20 %. Les banques qui pouvaient porter une masse monétaire de 1000 
	euros, avec le capital dont elles disposent ne peuvent plus porter une masse 
	monétaire « que » de 500 euros. Elles ont donc le choix soit de faire une 
	augmentation de capital à 200 euros, pour pouvoir porter leurs prêts 
	existants, soit de réduire leurs prêts de moitié (diviser leur bilan par 
	deux). Dans le premier cas, on peut légitimement se demander qui va 
	souscrire à une augmentation de capital dans un secteur dont la rentabilité 
	va s’effondrer (fonds propres deux fois plus importants, même taille de 
	volume de prêts= une rentabilité qui s’effondre), et dans le deuxième, comme 
	l’a très bien montré Milton Friedman dans ses travaux, un effondrement de la 
	masse monétaire entraîne toujours un effondrement de l’activité 
	économique au travers d’une « déflation par la dette ».  
	 
	Il est donc tout à fait évident que l’effondrement des bourses a comme « 
	cause première » ces nouvelles règles établies à Bâle par des comptables qui 
	ne comprennent rien à l’économie et qui cherchent à fixer des règles pour 
	que le risque bancaire disparaisse à tout jamais, ce qui est proprement 
	idiot puisqu’un monde sans risque est un monde en dépression. 
	 
	Le plus foudroyant est que les hommes politiques ne cessent de réclamer aux 
	banques qu’elles accordent plus de prêts alors qu’à l’évidence les mesures 
	qu’ils prennent ou font prendre vont arriver exactement au résultat inverse… 
	 
	Ce qu’il faut faire, c’est casser les grandes banques en une multitude de 
	petites pour que des risques soient pris à nouveau et que la concurrence 
	règne dans le monde bancaire comme partout, interdire aux banques d’acheter 
	des obligations d’Etat avec leurs dépôts, pour que l’Etat emprunte à un coût 
	normal et cesse d’être subventionné de façon éhontée, et bien sûr baisser 
	les ratios entre capital et prêts pour que les banques puissent financer à 
	nouveau le secteur privé. 
	 
	La probabilité que cela se passe, à mon avis, est exactement égale à zéro, 
	mais je peux toujours rêver… 
	 
	Charles Gave 
	 
	PS Petite règle à noter : dans une récession 4 % de clients font faillite, 
	dans une dépression le double. Donc le capital doit être suffisant pour 
	prendre une récession et une dépression à la suite, soit environ 12 %.  
	
	 
	
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