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	Abracadabra ! Disparue par magie, 
	la                   
	dette de la Sécu ! 
	 C’est un tout petit papier, page 4 de La Tribune ce matin. Il ne 
	suscitera aucun commentaire, son rédacteur lui-même n’y a apposé que ses 
	initiales, manière de dire qu’il y a plus important que le sujet traité. 
	 
	Le titre du papier : « Les solutions pour la dette de la Sécu ». Et le 
	sous-titre : « La dette sociale de ″crise″ pourrait revenir à l’Etat. » Dans 
	le corps du papier, le raisonnement et les informations sont très simples, 
	accessibles à tous, compréhensibles par tous. Cette année, le déficit de la 
	Sécurité sociale sera d’au moins 20 milliards d’euros, et l’an prochain il 
	sera au mieux identique à celui de cette année. Comment traiter cette 
	catastrophe annoncée ? 
	 
	Jusqu’ici, les déficits répétitifs et anciens de la Sécu étaient traités par 
	cette admirable invention de la technocratie française qui s’appelle la 
	Cades (Caisse d’amortissement de la dette sociale), laquelle est financée 
	par cette autre trouvaille de la technocratie française, la CRDS 
	(contribution au remboursement de la dette sociale), prélevée sur chacune de 
	nos fiches de paye. Transférer les très gros paquets déficitaires 2009-2010 
	et suivants à la Cades obligerait à augmenter la CRDS. Vous suivez ? Et 
	comme le président, le gouvernement, les chambellans, les députés, les 
	concierges, les présentateurs de télévisions, les tourneurs fraiseurs, les 
	footballeurs, les acteurs français des films de Lars von Trier qui est 
	depuis longtemps un réalisateur détestable et Dogville un insupportable film 
	minable, tous disent et répètent qu’il n’est pas question, pas une seconde, 
	pas un instant, plutôt crever, d’augmenter les impôts, alors pas de 
	transfert possible et imaginable à la Cades que le monde entier, sans doute, 
	peut-être, nous envie. 
	 
	Donc, que faire ? Lénine, déjà, se posait la question. La réponse est dans 
	l’articulet de La Tribune. La dette 2009 et celle de 2010, 
	considérées comme des dettes de crise, Eric Woerth dixit, pourrait être 
	reprise directement par l’AFT (Agence France Trésor) qui se chargerait de la 
	financer. Avantage de ce mécano que nous redevons à l’ingéniosité de la 
	technocratie française ? Ni vu, ni connu, la dette disparaît dans l’immense 
	puits sans fond et sans fonds français, financé par des artistes de la dette 
	qui aspirent chaque jours des centaines de millions d’euros, de dollars et 
	du reste sur les marchés des capitaux. Comme c’est l’AFT qui s’en occupe, la 
	dette ne dégrade pas les comptes de l’Etat. Donc, Bruxelles n’a rien à dire. 
	Et comme c’est l’AFT qui s’en occupe, inutile d’augmenter les impôts. 
	 
	Deux leçons, au moins, sur la société française grâce à cet articulet de 
	La Tribune. Rupture ou pas rupture, changement de président ou pas, de 
	premier ministre ou pas, de majorité ou pas, les vieilles recettes qui 
	consistent à mettre la poussière sous le tapis perdurent. La dette, 
	l’endettement, est devenue notre drogue. Elle nous permet de supporter notre 
	incapacité à financer les piliers de notre pacte social. Comme toute drogue, 
	elle est un mensonge. Un jour, la réalité rattrape le drogué, et la douleur 
	alors est immense, la détresse aussi. Par ailleurs, deuxième leçon, nous 
	laissons tous faire cela sans nous soucier de rien. Nous aurons mauvaise 
	grâce, au jour du désastre, à dire que l’on ne nous a rien dit, que l’on 
	nous a caché la vérité. 
	 
	La vérité de la France, ce matin, allez donc la chercher à la page 4 du 
	journal La Tribune.  
	Jean-Michel Aphatie 
	 
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